Ils parlent de ma peinture avec des mots
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Le blog « Provence Réflections » vous propose un article sur Nadine Nacinovic et sa peinture.
« Nadine est née à Nice sur la Côte d’Azur où elle a grandi en absorbant toute la lumière et les vives couleurs du sud ensoleillé de la France…Lire plus
Depuis le début de la floraison, Nadine s’est rendue plusieurs fois dans ce verger d’amandiers à Salettes, tout près de chez elle.
A divers moments de la journée, elle l’a arpenté, s’en est imprégnée, nourrie, l’a croqué, saisi, tout à l’écoute de ses sensations colorées qu’elle s’applique maintenant à restituer dans l’espace du tableau.
Elle commence à peindre tôt dans son atelier très vite rempli de la lumière matinale, s’embarque à chaque fois comme la première dans une nouvelle peinture de paysage. Elle travaille en musique, en compagnie d’adagios calmes, puissants.
Ils l’aident à se concentrer, tempèrent et libèrent tout à la fois ses gestes. Ses couleurs et ses pinceaux y puisent leur légèreté aérienne.
Nadine travaille dans le mouvement, dans la surprise de ce mouvement. Elle retouche d’abord les surfaces colorées déposées sommairement la veille lors d’un premier jet. Une couleur en appelle une autre, le rose d’une fleur suscite soudain une touche de vert tendre haut dans le ciel.
Elle les recouvre, les déplace selon son ressenti de ce nouveau jour. Les accords esquissés en quelques coups de pinceaux sont provisoires, fugitifs. Chaque nouvelle touche en déséquilibre d’autres et c’est tant mieux : Nadine provoque de telles tensions, les utilise car elle sait que ce sont d’elles que surgira la singularité du tableau.
Elle recule souvent, observe, revient, attentive en particulier aux relations qui se nouent entre le ciel et le sommet des amandiers, n’hésite pas à agrandir ledit ciel. Le voici qui redescend chatouiller les fleurs, se densifie à leur contact, se rehausse de bleu. Au sol, les surfaces ensoleillées se resserrent, s’intensifient, s’illuminent, accentuant leur contraste avec les taches d’ombre fraiche.
D’un trait de fusain nerveux, Nadine décide soudain de renforcer la structure des branches et du tronc de l’amandier au premier plan. Alors cet arbre qui a inspiré toute cette mise en scène trouve, affirme enfin sa juste forme, sa juste force. Les volumes et l’agencement des autres amandiers, derrière, s’en font le tendre écho.
Le doux balancement des branches peut maintenant, tranquillement, accompagner l’éblouissement du spectateur devant ce miracle annuel.
Geneviève Bellon, avril 2021
Peintures de Nadine Nacinovic
Textes de Geneviève Bellon
(poète et animatrice des ateliers d’alphabulles)
D’un gros pinceau mouillé
Elle détrempe sa feuille
Et mélange cette eau
Au feu des couleurs
De son cœur
Ses yeux ancrés dans leur sensation
S’illuminent de ciel
Le soleil en est fier
La main gauche s’applique
A partager avec les grillons
La chanson du vent
Qui raconte sa rencontre
Avec la terre
Elle respire le monde
Qui rayonne et résonne
Dans son corps
Sur sa feuille
Ses mains sont pleines
De joie.
L’instant est malmené par le mistral qui empêche tous êtres et toutes choses de se poser.
Mais Nadine sait et ose engager ce combat éperdu de fixer leur mouvement sur sa toile.
Elle tient un gros fusain rond dans la main gauche.
Un trait vertical s’érige, puis d’autres : ce sera un tableau d’arbres.
Les peupliers frémissent, vibrent de leur plaisir d’être caressés par les yeux de cette dame de la ferme des dames.
Elle ouvre de grands tubes de matière et c’est par de l’orange que s’inaugure la couleur.
Orange qui ressuscite les feuilles d’un lierre arraché à la base d’un tronc. Oui, il faut le peindre aussi, lui qui repartira à l’assaut du tronc d’un autre arbre ou du même, lui qui aspire aussi à accéder à la lumière céleste.
Vent, soleil, végétation mouvante, fragile, forte, exténuante, se disséminent en touches chaudes sur la toile, au gré du pinceau décidé, précis, agile.
Trois autres pinceaux patientent dans la main droite, pinceaux maintes fois rincés, imprégnés, séchés au service de la main et de la matière.
Bon bon bon dit Nadine et le vent répond hou hou hou.
Soudain un bleu céleste se pose sur la toile, tout à côté du jaune solaire des blés mûrissants : la dame a transformé la lumière en or.
Ici chante l’eau née de la source.
Elle court, joyeuse, pressée, impatiente d’arriver elle ne sait où. Ce printemps encore, un de plus, elle a réveillé le saule qui dormait de son sommeil d’ombre.
Il n’en est pas surpris, au contraire et, avide d’elle, il déploie ses feuilles tendres toujours plus haut dans l’air.
Parfois l’eau tente de le noyer en ceinturant ses racines, mais celles-ci se nourrissent alors encore plus d’elle pour mieux porter leurs louanges au ciel.
Plus la source descend, plus elle descend vite, plus son chant monte, plus le saule monte haut.
Son écume aussi, qui s’évapore dans les branches des arbres voisins et devient aérienne dans leur frondaison si blanche, si neuve.
Elle monte encore, emplit le ciel, excite le soleil qui en retour la contamine de son or ainsi que le saule, la terre, l’eau, le tableau et nous leurs spectateurs.
Printemps de joie.
Urgente.
Fleurs encore un peu closes, déjà épanouies.
Fleurs chaudes, crème, jaunes, roses, rouge foncé, violettes. Fleurs de chair, vivantes, vibrantes.
Fleurs impudiques qui exhibent leur luxure, débordent de leur désir incandescent, enflamment le fond du tableau et le pot dans lequel elles se baignent, réchauffent son eau, les quelques feuilles et le si peu d’ombre qui leur résiste
Fleurs d’Eros.
Elles exultent.
Douze fleurs rouges, rouges, rouges
Douze fois rouges.
Douze vulves gonflées, écarlates, pleines, mûres.
Elles envahissent le bleu du ciel, l’enluminent.
Soudain le monde a chaud dans cette éternité de la chair pour laquelle elles naissent et meurent.
Elles nous font vivre.